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Mathilde Dubesset a consacré sa carrière d’historienne à la question des femmes. Ses principaux thèmes de recherche sont : histoire des femmes et du genre, femmes et religions et le travail des femmes. Elle nous donne son avis d’historienne des femmes sur cette nouvelle tendance : la mode islamique. 



Voilà ce que résume la mode d’aujourd’hui. Auparavant, dans chaque décennie que vous aviez pu voir, il y a un style vestimentaire qui ressort pendant des années : la mini-jupe, le pantalon, le tailleur, les vêtements de sports… Mais aujourd’hui y a t-il une invention ou un style prédominant ? Malheureusement, il n’y en a pas. 



La mode aujourd’hui est une sorte d’imitatrice qui reprend les looks des années précédentes. Ce qui marque les années 2000 c’est le grand retour des tendances des années 70 - 80 avec les épaulettes rembourrées, les pantalons fleuris, paillettes, brillants.


C’est une époque assez libre au niveau du style vestimentaire. Aujourd’hui les femmes ont le choix et peuvent ainsi porter plusieurs looks différents en une semaine. Un jour, elles peuvent se rendre au travail en étant décontracté avec un jean, des baskets et un sweat-shirt, un style des années 90. Un autre jour, elles peuvent décider d’être habillées en jupe avec un chemisier, un tailleur et des talons. 

5 points à retenir

Citations :  L’unisexe et l’individualisme. Trop de mode, de courants, de tendances : la femme se cherche. Du coup, tout se mélange et le goût devient plus individuel. » Anne Valérie Hash, créatrice.


Invention : Naissance du slim, naissance de la mode islamique


Loi : Loi sur le voile 2010 (interdiction de cacher son visage dans l'espace publique)

Loi abrogée sur l'interdiction du port du pantalon chez la femme 2013


People : Naomi Klein (ouvrage : No logo), Kate Moss, Gisele Bündchen, Constance Jablonski 



L'imitatrice

Créateurs : Dolce & Gabbana, Christian Louboutin, Christian Dior, Yves Saint Laurent

Irina Capron : Que pensez-vous du port du voile ? 

 

 

Mathilde Dubesset : « Que des gens souhaitent s’habiller en fonction de leurs origines et de leur culture, est synonyme de diversité mais comme il y a eu ce débat à propos du port du voile pensé comme une provocation, ou une façon de s’imposer et même dans les écoles, il y a un vrai questionnement. Le port du voile est un débat qui a 30 ans. Tout d’abord, il ne faut pas confondre la mode islamiste et islamique. C’est un terme très dangereux ! Et puis, il y a deux dimensions à prendre en compte. D’une certaine manière il y a des effets pervers car le voile peut être interprété comme une contrainte rude faite a des femmes pour montrer que ce sont de bonnes musulmanes et comme une obligation. De l’autre côté, elles mettent ce voile par volonté d’affirmer leur identité. Mais il y a aussi le business. Une demande sociale spécifique en Europe. Je ne suis pas étonnée que ces marques comme Gaultier et Mark and Spencer qui proposent le burkini, par exemple, aient trouvé le filon. »

 

 

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Pour visionner l'interview, passez la souris sur le visage de la personne puis cliquez sur lecture.

L’industrie de la mode a compris les opportunités financières qu’offre la mode musulmane. Si le marché est en pleine expansion en Occident, aucune marque n’a encore intégré des collections pour les femmes musulmanes dans les rayons de ses boutiques françaises, pour le moment.




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 " Il ne faut pas confondre la mode islamiste et islamique. C’est un terme très dangereux ! "


Mathilde Dubesset 

Interview de Mathilde Dubesset, historienne des femmes 

 Il est important de rappeler qu’un texte de loi, promulgué le 11 avril 2011, interdit de dissimuler son visage dans l’espace public. La loi interdit les cagoules ainsi que les niqabs (voile intégral couvrant entièrement le visage à l’exception des yeux) et les burqas.

 

 

Cependant, dans un article du journal 20 Minutes, nous avons pu lire des témoignages de jeunes femmes musulmanes qui n’ont pas compris la polémique sur la mode islamique. Selon Aziza, 52 ans, les femmes sont voilées par choix : « Il faut arrêter de croire que le port de voile est contraint. » Ouassila, 45 ans qui vit dans le Val-de-marne explique que certaines jeunes femmes se voilent même simplement par effet de mode comme d’autres suivent la tendance gothique. 

 

 

Les blogueuses sont un signe d’évolution. Elles sont de plus en plus nombreuses à communiquer sur le web en réinventent la féminité musulmane et donne des conseils en combinant tendance et respect de l’islam. 

 

Dans un reportage télévisé, Asma Fares, blogueuse de mode, présente des looks élégants avec un hijab. Elle prouve ainsi que religion et port du voile ne sont pas incompatibles. « On dit que notre Dieu aime la beauté, alors il faut être beau, il faut être propre, ça rentre vraiment dans notre religion. On est aussi coquette que tout le monde, que toutes les femmes de notre génération, et on aime avoir le choix »

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Laurence Rossignol, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes est la première à blâmer les marques qui s’emparent de la mode islamique.

Elle estime qu’ils font de la « promotion de l’enfermement du corps des femmes ». 



Pierre Bergé, ancien compagnon de Yves Saint Laurent et entrepreneur en confection de luxe, est choqué par cette nouvelle tendance : « Je suis scandalisé,

moi qui ai été pendant 40 ans aux côtés de Yves Saint-Laurent, j’ai toujours cru qu’un créateur de mode était là pour embellir les femmes, pour leur donner

la liberté, et en tous cas pas pour être le complice de cette dictature imposée qui fait que l’on cache les femmes. Il faut leur apprendre à se dévêtir et à se libérer ».

" Il n’y a pas de règles dans la mode. "    

H&M



Il nous est impossible de parler de l’époque actuelle sans mentionner les femmes musulmanes et la mode islamique. Une nouvelle tendance qui fait polémique..


Nous avons rencontré Bruno Benedic, professeur à l’école de mode ESMOD et sociologue de la mode, il nous donne son avis sur cette époque imitatrice où le glamour disparaît. Selon lui, la féminité est manquante chez certaines femmes mais aussi dans les magasins de prêt-à-porter et de luxe. 

 

 

«  Il y a tellement de choix, que les femmes ne savent pas quoi choisir. Alors qu’en 1980, tout le monde achetait le produit phare qui venait de sortir. C’était plus facile de s’émanciper avant qu’aujourd’hui. Il y avait moins de dangers d’affirmer sa féminité. Si les femmes s’habillent comme des hommes aujourd’hui, c’est bien qu’il y a un problème. Une féminité qui n’arrive pas a s’exprimer. Les hommes et les femmes sont faits pour se retrouver, non pour s’imiter. Pourquoi s’est-on précipités chez H&M lors de la collection Balmain ? Parce que c’est le glamour… Il y a un manque, oui absolument ! »

 

 

 Lors de cette période, la consommation joue beaucoup. D’un côté nous avons les femmes qui veulent porter de la marque et de l’autre nous avons une certaine frénésie du « No logo ».

 

 

En 2000, nous pouvons comparer la mode à l’art contemporain. Les femmes veulent ressembler et s’habiller comme leurs idoles et se permettent ainsi d’acheter ce que les célébrités portent. Le nom du créateur compte plus que son aspect. Il y a eu un réel engouement autour de Christian Louboutin et de sa semelle rouge. Toutes les stars en portent et cela donne envie aux femmes de s’en procurer. 

La publicité et la notoriété jouent un grand rôle pour les consommateurs. Lorsqu’un produit phare est mis en vente, la marque choisit une égérie dans laquelle les femmes pourront se retrouver. 

Dans l’industrie du luxe, la crise n’est pas connue. Le bilan de 2010 annonce une progression de 19% du groupe LVMH et 25% pour Hermès. 

 

 

En France, en 2001 est paru un ouvrage « No logo » écrit par Naomi Klein, une journaliste canadienne. Dans ce livre, elle décrit les abus commis par les grandes marques sur les lieux de fabrications notamment avec le combat contre Nike au sujet de l’affaire des ateliers d’esclavage et du travail d’enfants. Elle décrit également des formes de résistances qui se mettent en place face à l’invasion de l’espace public par les multinationales. Cette journaliste dénonce les effets dévastateurs des marques à l’échelle mondiale. 

 

 

Quinze ans après, nous ne sommes toujours pas sortis de l’ère des logos. Aujourd’hui les marques ont même investi le marché de l’art en réalisant des expositions. Le fétichisme pour les marques s’est répandu sur le globe, le succès d’Apple ou de Nespresso ne se dément pas. 

 

 

Nous pouvons alors dire que cette époque n’a pas de fil directeur tout au long des années 2000 à aujourd’hui. Certes il y a eu quelques inventions comme le slim, une forme de pantalon très moulante et très serrée au niveau des jambes. C’est en 2004 que cette tendance est apparue notamment avec la marque suédoise Cheap Monday qui a écoulé plus de 5 000 slims lors de son année de commercialisation. Mais le slip est un vêtement re-stylisé du pantalon qui a déjà été pensé lors des années 70. Alors nous pouvons nous demander si nous avons déjà tout inventé ? Ou si la révolution de la mode se fera dans les années à venir ? 

Dans un sens, si les femmes peuvent s’apprêter sous différents styles quand elles le veulent et selon leurs envies, cela montre de nouveau l’évolution de l’émancipation des femmes. Aujourd’hui, les femmes sont libres de s’habiller comme elles le souhaitent et se moquent des préjugés. C’est seulement en 2013 que les femmes ont le droit de porter un pantalon. La loi interdisant "le travestissement des femmes", qui datait de 1800, a en effet été abrogée le 31 mars 2013. Même si elle n'était plus respectée depuis bien longtemps, la loi était toujours en vigueur.



Cependant, même si les femmes peuvent s’habiller comme elles le souhaitent cela n’est pas au goût de tout le monde. Le harcèlement de rue devient un réel problème de société. Dans la rue, quelles que soient les tenues vestimentaires, les jeunes femmes sont régulièrement victimes de remarques gênantes, sifflements, voire insultes. Malgré les actions des associations ou les campagnes de sensibilisations, certaines femmes préfèrent aujourd’hui troquer leurs vêtements féminins contre ceux plus masculins.



C’est ce qu’a décidé de faire Carine, 33 ans : « J’ai été très souvent victime d’harcèlement de rue.. Un été, on m’a mis la main aux fesses parce que je portais un short. Une autre fois on m’a insulté parce que j’avais mis une robe. Je ne comprenais pas pourquoi autant d’acharnement sur moi, je n’étais pourtant pas vulgaire je pensais avoir du style. C’est trop dur pour moi alors j’ai choisi de m’habiller différemment. » Aujourd’hui, cette jeune femme parcourt Paris en pantalon très large, des gros pulls et des baskets. 

2000 A aujourd’hui 

L’unisexe et l’individualisme. Trop de mode, de courants, de tendances : la femme se cherche. " Du coup, tout se mélange et le goût devient plus individuel. " Anne Valérie Hash, créatrice.

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"La mode se démode, le style jamais",

disait Coco Chanel.

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Dans une récente publicité mondiale de la marque suédoise, H&M a signé ce message. Pour la première fois, apparaît une jeune femme musulmane dont les cheveux et le cou sont recouverts d’un foulard. 



Les grandes enseignes de prêt-à-porter et les créateurs convoitent de plus en plus la clientèle islamique. Uniqlo lance sa collection de Hijabs (voile) dans ses magasins londoniens, des vêtements de bain entre le bikini et la Burqua chez Marks & Spencer ou encore la maison italienne Dolce & Gabbana. Traditionnellement catholique, la célèbre marque de luxe a dévoilé début janvier 2016, sa collection Abaya composée de hijabs et d’abayas, deux différents types de voiles.  Les pièces sont de couleurs sobres, elles révèlent des motifs fleuris ainsi que des broderies. 


Interview de  Bruno benedic

Diplômé en Lettres, Histoire, Sociologie et Stylisme, Bruno a participé au

développement de lignes d’accessoires pour Chanel, Givenchy et Balmain avant

de se lancer dans le conseil en marketing style sur le secteur Accessoires pour des

bureaux de styles et diverses marques. Il possède des compétences très larges

allant de la sociologie au style en passant par une connaissance poussée du marché

de l’accessoire.

Même si les musulmans représentent 22% de la population mondiale et que ce marché pourrait peser plus de 320 milliards de dollars en 2020. En France                                                                                                       la polémique ne cesse de s’agrandir tant au niveau des créateurs, que des politiques. 

                                                                                          

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IC : Quel est votre avis sur la mode islamique et ses consequences ? 



MD : « Quel effet pour les femmes concernées ? Est-ce que ça leur convient ou à l’inverse, est-ce que cela pourrait inciter des hommes de la famille à le faire porter à la petite sœur ou à la cousine ? Il pourrait s’agir d’un moyen de pression sur elles. Je n’ai pas de position comme Laurence Rossignol qui veut interdire cette mode mais il faut s’assurer que ce n’est pas là encore, un élément d’imposition, de pression. Le vestiaire occidental a gagné la planète face au recul du port des costumes traditionnels. Le voile peut aussi être considéré comme une manière de se tenir dans d’autres pays, face a certains comportements en France. Et puis, on voit aussi des magasins spécifiques : la mode gothique ou ecclésiastique… »

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